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Blanche-Neige est le nom du personnage principal éponyme d'un conte (conte-type 709 dans la classification Aarne-Thompson) dont la version la plus célèbre est celle recueillie et mise en forme par Jacob et Wilhelm Grimm, parue en 1812. Ce conte n'a pas d'équivalent dans le recueil français antérieur des contes de Perrault.

Blanche-Neige

Blanche-Neige étendue dans un cercueil de verre.
Illustration de Marianne Stokes.
Conte populaire
Titre Blanche-Neige
Aarne-Thompson AT 709
KHM KHM 53
Folklore
Pays Europe
Époque XIXe siècle
Version(s) littéraire(s)
Publié dans Frères Grimm, Kinder- und Hausmärchen, vol. 1 (1812)

Version des frères Grimm



Genèse


Les frères Grimm ont rassemblé plusieurs versions du conte[Lequel ?], collé les textes ensemble et parfois écourté[1]. Dans la première version de 1812, la reine est la mère naturelle. Blanche-Neige se réveille lorsqu'un valet du prince lui donne un coup dans le dos car il était énervé d’avoir eu à la porter toute la journée. D’autres petites différences sont à trouver comme le repas avec le prince.[précision nécessaire]

Dans deux versions non éditées, la reine fait faire un tour en carrosse dans la forêt et demande à Blanche-Neige de descendre afin de cueillir des roses ou de ramasser son gant et s’enfuit (comme dans Hansel et Gretel). Dans une autre version, c’est le père qui souhaite avoir une fille.

Comme origine du conte, on suppose Marie Hassenpflug, quelques inspirations de Ferdinand Siebert et Albert Ludewig Grimm (Des Knaben Wunderhorn, 1809). L’idée des gouttes de sang de la mère naturelle cadre avec le conte nord-allemand « Vom Machandelbaum » du peintre Philipp Otto Runge.


Résumé


Une bonne reine se désole de ne pas avoir d'enfant. Un jour d’hiver, alors qu'elle est assise près d'une fenêtre au cadre d'ébène, elle se pique le doigt en cousant. Quelques gouttes de sang tombent sur la neige. « Ah ! » se dit la reine, « si j'avais une petite fille, à la peau blanche comme la neige, aux lèvres rouges comme le sang et aux cheveux noirs comme le bois d’ébène ! ».

Peu de temps après, elle meurt en accouchant d'une petite fille nommée Blanche-Neige. Le roi se remarie alors avec une femme très belle mais méchante, orgueilleuse et jalouse de Blanche-Neige. Chaque jour la reine demande à son miroir magique qui est la plus belle du royaume, et chaque jour le miroir, qui ne ment jamais, lui répète qu'elle est la plus belle femme du royaume. Jusqu'au jour où il doit reconnaître que Blanche-Neige, bien qu'encore enfant, est devenue plus belle que sa marâtre. Cette dernière demande alors à un chasseur d'aller tuer la princesse Blanche-Neige et de lui rapporter comme preuve son foie et son coeur. Mais l'homme ne peut s'y résoudre et abandonne Blanche-Neige dans les bois, songeant qu'elle sera bientôt dévorée par les bêtes sauvages. Le chasseur tue alors un marcassin qui passait par là et rapporte son foie et son coeur à la méchante reine. Celle-ci, croyant qu'il s'agit des organes de Blanche-Neige, les fait cuire et les dévore.

Errant dans la forêt, la princesse Blanche-Neige découvre une petite maison où elle entre se reposer et se restaurer. C'est la demeure des sept nains qui, apitoyés par son histoire, acceptent de la cacher et de la loger en échange de tâches ménagères. Chaque jour avant d'aller à la mine, les nains la mettent en garde et lui recommandent de n'ouvrir à personne, sachant bien que tôt ou tard la reine saura que sa rivale est toujours en vie.

Effectivement, la méchante reine finit par apprendre, grâce au miroir magique, que Blanche-Neige est toujours vivante. Elle tente alors par trois fois de faire mourir la princesse. D'abord elle se grime en vieille marchande et s'en va proposer des lacets de couleur à Blanche Neige. Celle-ci se laisse tenter et la vieille serre le lacet de son corset si fort que Blanche-Neige en perd la respiration et tombe comme morte. Heureusement, les sept nains à leur retour comprennent ce qui s'est passé et coupent le lacet, permettant à Blanche-Neige de respirer à nouveau.

Furieuse d'apprendre grâce au miroir magique que la princesse Blanche Neige est toujours vivante, la méchante reine se déguise à nouveau en marchande pour vendre un beau peigne à la princesse Blanche-Neige. Bien que sur la défensive, Blanche-Neige est tentée à nouveau, et laisse la vieille peigner ses cheveux : le peigne empoisonné lui fait aussitôt perdre connaissance. Les sept nains découvrent le peigne à leur retour et le retirent de la chevelure de Blanche-Neige, qui revient immédiatement à la vie.

Folle de rage, jurant d'y laisser la vie s'il le faut, la méchante reine se déguise une troisième fois en paysanne. Grâce à un habile stratagème elle trompe la vigilance de la princesse Blanche-Neige : elle a empoisonné la moitié rouge – la plus tentante – d'une pomme, laissant la partie blanche intacte. Coupant la pomme en deux, elle en croque la partie blanche inoffensive et offre la partie empoisonnée à Blanche-Neige. Celle-ci croque à son tour dans la pomme et tombe inanimée. Les nains ne parviennent pas à la ramener à la vie, et le miroir magique déclare enfin à la reine qu'elle est la plus belle du royaume.

Affligés, les sept nains préparent un cercueil de verre pour la princesse Blanche-Neige, qui semble simplement endormie. Ils le déposent sur une colline afin que toutes les créatures puissent venir l'admirer. Chaque jour, ils surveillent le cercueil jusqu'à ce qu'un prince qui chevauche par là tombe amoureux de la belle endormie. Après mainte supplication, il obtient des sept nains la permission d'emporter le cercueil. Mais en route un porteur trébuche sur une grosse racine, délogeant le morceau de pomme coincé dans la gorge de Blanche-Neige, qui se réveille. Le prince lui demande sa main, et Blanche-Neige accepte.

Invitée au mariage, la méchante reine découvre que la nouvelle reine est la plus belle, et reconnaît avec terreur Blanche-Neige. Elle est alors condamnée à danser avec des souliers de fer chauffés au rouge, jusqu'à ce que mort s'ensuive.


Interprétations


Comme bien des contes populaires, Blanche-Neige est ouvert à de multiples interprétations.


Conte moral


Blanche-Neige montre qu'il ne faut pas s'attacher à des choses éphémères telles que la beauté et la jeunesse. La patience et l'humilité sont toujours récompensées, alors que la vanité peut mener à la chute.[réf. nécessaire]

Il s'agit aussi d'un conte d'avertissement envers les personnes offrant quelque chose de tentant et dont l'héroïne naïve ne se méfie pas du tout.[réf. nécessaire]


Conte initiatique féminin


Erik Pigani, psychothérapeute, explique que le conte décrit les étapes de la puberté chez la jeune fille[2]. La première reine, mère de Blanche-Neige, se pique le doigt et fait tomber trois gouttes de sang sur la neige blanche avant de mourir quelque temps plus tard en couche. C'est une scène au tout début de l'histoire, préparant la jeune fille à son avenir, qui fait écho à l'innocence de l'enfance qui se perd avec la couleur rouge des menstruations, et le début de la sexualité mais aussi de la possibilité d'une conception. Le symbolisme de la pomme renvoie au fruit défendu de la Genèse. Le fait de croquer la pomme marque le passage entre la vie insouciante de l’enfance et celle d’adulte.

Selon Pigani, une notion morale s'ajoute avec le fait que la mère, même si elle souhaite garder sa beauté et sa jeunesse, doit laisser la place à sa fille.


Conte œdipien


Le conte a été étudié par plusieurs psychanalystes, notamment Bruno Bettelheim[3] et Marie-Louise von Franz.

Pour Bruno Bettelheim, le conte commence par une situation œdipienne mettant en conflit la mère et la fille. La marâtre est restée à un stade narcissique qui la rend vulnérable et que le conte invite à dépasser[4]. La jalousie de la belle-mère est à la fois la peinture du comportement de certains parents qui se sentent menacés au moment de l'adolescence de leurs enfants, mais également une projection sur une figure haïe des propres sentiments de jalousie de l'enfant[4]. Blanche-Neige se retrouve chassée du château, errant dans la forêt, lieu de terreur et de confusion comme le début de la puberté. Recueillie par les sept nains, personnages à la fois masculins mais peu menaçants sexuellement, elle peut se développer dans un milieu sûr, mais non sans être exposée à la tentation narcissique (les colifichets offerts par la méchante reine). Cette période peut être vue comme un moment d'initiation, où l'adolescent doit se mesurer aux dangers de l'existence. La dernière tentation, celle de la pomme, représente pour Bruno Bettelheim le moment où l'adolescent accepte d'entrer dans une sexualité adulte[5], c’est-à-dire le moment où il devient pubère. Suit une période de latence (le coma) qui lui permet d'attendre en toute sécurité que sa maturité psychique jointe à sa nouvelle maturité physique lui donnent enfin accès à une sexualité adulte.


Interprétations d'éléments


Le miroir magique révèle l'ombre de la psychologie jungienne, la part « maléfique » mais vraie de la reine mais aussi à Blanche-Neige qu'elle est « potentiellement » porteuse de cette cruauté. Bruno Bettelheim écrit à ce propos[6] :

« Tout conte de fées est un miroir magique qui reflète certains aspects de notre univers intérieur et des démarches qu'exige notre passage de l'immaturité à la maturité. Pour ceux qui se plongent dans ce que le conte de fées a à communiquer, il devient un lac paisible qui semble d'abord refléter notre image ; mais derrière cette image, nous découvrons bientôt le tumulte intérieur de notre esprit, sa profondeur et la manière de nous mettre en paix avec lui et le monde extérieur, ce qui nous récompense de nos efforts. »

« Les mythes mettent en scène des personnalités idéales qui agissent selon les exigences du surmoi, tandis que les contes de fées dépeignent une intégration du moi qui permet une satisfaction convenable des désirs du ça. »


Base historique


Comme beaucoup de contes des frères Grimm, Blanche-Neige possède sans doute aussi un fond historique.[7],[8]


Blanche-Neige à Alfeld


On présume l'origine du conte au sud de la Basse-Saxe dans le massif des sept monts (Siebengebirge), une chaîne de collines dans le Leinebergland, où les frères Grimm aimaient se promener et où ils collectaient contes et histoires. Au nord-ouest de ce massif, on trouve un lieu lié à une mine : Osterwald. Il s’agit d’un lieu-dit de la ville de Salzhemmendorf. À cet endroit, depuis le XVIe siècle, on exploite du charbon. On produit également dans les environs du verre : le Lauensteiner Glas. En prolongeant une ligne à partir de Osterwald jusqu’à Alfeld, en passant par le massif des Siebengebirge, on tombe sur les ruines du château de Stauffenburg, où la méchante belle-mère aurait habité. Une autre référence est le fait que les frères Grimm ont étudié à l’université de Göttingen qui se trouve dans les environs. En 2002, les habitants de la ville d’Alfeld, qui se trouve au sud-ouest du massif des Sieben Berge sur la rivière Leine, ont retrouvé et baptisé un sentier Schneewittchenpfad (le sentier de Blanche-Neige)[9].


Blanche-Neige à Cassel


L’importante influence de la conteuse Marie Hassenpflug sur les frères Grimm permet de supposer une origine en Hesse. L'historien de Hesse Eckhard Sander voit comme origine du conte le destin de la fille du comte de Waldeck, Marguerite de Waldeck (ZDF film documentaire 2006 de Kirsten Höhne et Claudia Moroni[10]). Sur une gravure, elle porte les attributs de Blanche-Neige : « Blanche comme la neige, rouge comme le sang et des cheveux noirs comme le bois d’ébène »[11]. Selon des documents des archives de la ville de Bad Wildungen, elle fut connue pour sa grande beauté et avait une belle-mère très sévère. Lorsqu'elle eut environ 16 ans, son père, le comte Philippe IV de Waldeck, l'envoya à la cour impériale du Brabant, aujourd’hui Bruxelles, où elle devait se marier avec un prince. Marguerite traversa le massif des Sept Monts. Mais il y eut des difficultés lorsque certaines personnes de haut rang, comme le comte Egmont et le prétendant au trône (le futur Philippe II), lui firent la cour. La santé de la jeune fille se dégrada et finalement elle mourut le à l'âge de 21 ans. Dans les chroniques de la ville de Waldeck, on retrouve la mention qu'elle fut empoisonnée. L’écriture tremblotante de son testament laisse croire à un empoisonnement par arsenic, typique de l’époque. Le lieu où ont vécu les sept nains doit être Bergfreiheit (de). Ce village se nomme lui-même « le village de Blanche-Neige » (Schneewittchendorf). Que Marguerite soit blonde n’a pas beaucoup d’importance car dans une version antérieure du conte des frères Grimm de 1808, les cheveux de Blanche-Neige sont blonds. Dans le petit village du centre de la Hesse, Langenbach im Taunus, on trouve également des points de repère sur Blanche-Neige et les sept nains. Des évènements locaux ainsi que des noms de lieux-dits appuient cette thèse[12]. L’endroit se trouve sur la Hessenstraße route de la Hesse »), chemin historique reliant par exemple le lieu d’étude des frères Grimm : Marbourg. En cet endroit, il y eut également exploitation de mines. Un lieu-dit s’appelle « Im Zwerggrund » (dans le lieu des nains). Dans une version antérieure du conte (version encore connue en Autriche), il n’est plus question d’un cercueil en verre (Glassarg) mais d’une montagne en verre (Glasberg)[13]. Autrefois, la montagne de verre représentait le lieu des morts. Non loin du « Zwerggrund », on trouve encore aujourd’hui un « Glasberg ».


Blanche-Neige à Lohr


En 1986, l'historien de la ville de Lohr am Main, le docteur Karlheinz Bartels, a réussi à mettre en évidence beaucoup de points communs entre le conte et la ville, ainsi que sa région[14]. Bartels constate que le château de Lohr am Main, abritant le musée régional, dans l'arrondissement de Main-Spessart, est le lieu de naissance de Blanche-Neige.

D'après lui, Maria Sophia Margaretha Catharina d'Erthal, alias Blanche-Neige, est née en 1725 à Lohr am Main[15]. Son père, Philippe-Christophe d'Erthal, fut de 1719 jusqu'à 1748 grand bailli de l'Électorat de Mayence au Grand Bailliage (Oberamt) de Lohr. De par ses qualités diplomatiques, il se trouvait souvent en déplacement en tant que légat et « ministre des affaires étrangères » de l'archevêché. Dans cette fonction, il a mené de négociations dans toute l’Europe directement avec des empereurs et des rois[16]. C’est pourquoi pour le peuple de Lohr, le père de Blanche-Neige fut un exemple de ce qu’un roi devrait être.

Le château de Lohr était résidence officielle et domicile pour sa famille. Après la mort de la mère naturelle de Maria Sophia en 1741, le père se remaria le avec Claudia Elisabeth Maria von Venningen, veuve du comte impérial de Reichenstein. Cette femme se comportait de façon despotique et utilisait sa position pour privilégier ses propres enfants issus de son premier mariage, ce qui fut facilité par le fait que Philippe-Christophe n'était pratiquement jamais là. La non-présence et le rôle insignifiant du père dans le conte constaté par Theodor Ruf sont ainsi expliqués[17].

L'indice le plus important en faveur de Lohr am Main est le « miroir parlant ». Ce luxueux et fastueux miroir d’une hauteur de 1,60 mètre se trouve toujours au château et peut être vu de nos jours au musée de Spessart. C'est un produit de la vitrerie de Kurmainz, fondée en 1698 par le Prince-électeur Lothar Franz de Schönborn. La vitrerie devint réputée dans toute l'Europe grâce à la nouvelle technologie employée par son directeur légendaire, Guillaume Brument (1698 – 1759), et son équipe de Français venus de Tourlaville en Normandie. Guillaume Brument renouait avec la magnificence de la galerie des Glaces du château de Versailles.

Le miroir fut un cadeau de sa part à sa deuxième femme Claudia. Comme beaucoup de miroirs de Lohr, il y est inscrit une maxime. C'est pourquoi on les appelle des miroirs « parlants ». Le médaillon en haut et à droite contient une indication très claire sur l’amour-propre[18].

Dans Lohr et ses environs, on trouve également d'autres points de repère. La forêt « sauvage » où est abandonnée Blanche-Neige pourrait être le Spessart que Wilhelm Hauff (1802–1827) plus tard dans son auberge à Spessart qualifiait de forêt terrible. Le chemin emprunté par Blanche-Neige lors de sa fuite à travers les sept collines pourrait être un ancien sentier de montagne déjà connu au XIVe siècle, la « Wieser Strasse ». Il conduisait de Lohr aux mines près de Bieber[19] en passant par les collines de Spessart. C'est là, en 1750, qu'environ 500 mineurs extrayaient argent et cuivre. Les sept nains pourraient avoir été des personnes assez petites qui travaillaient dans les étroites galeries, voire des enfants. Bieber ne se trouvait pas sous l’autorité de Kurmainz, mais sous celle du comté de Hanau. La belle-mère n'y avait donc aucun droit légitime sur Blanche-Neige. Il est donc plausible qu’elle s'y fît passer pour marchande, vieille femme ou paysanne pour se débarrasser de sa concurrente.

De même, Bartels a pu retrouver de la littérature où est indiquée la façon dont la pomme put être empoisonnée par la belle-mère[20] : la moitié de celle-ci fut plongée dans du jus de belladone. Cette plante pousse dans la région de Spessart. Ses fruits contiennent de l'atropine qui provoque une paralysie et une forme de rigidité cadavérique. Le cercueil transparent en verre, ainsi que les pantoufles de fer avec lesquelles la belle-mère dut danser jusqu’à la mort, auraient pu être fabriqués sans problèmes dans une vitrerie et dans une forge de Spessart.

Ce sont les habitants de Lohr qui ont ensuite fait de l’histoire de Maria Sophia un conte merveilleux. Le chroniqueur de la famille Erthal, M. B. Kittel, caractérise Maria Sophia comme une fille noble, un ange de bonté et de charité, bienveillante pour les pauvres et les démunis[21]. Il atteste sa grande gentillesse. Pour le peuple, la fille des Erthal fut sans aucun doute un exemple, un idéal de ce qu’une princesse devait être.

Quelques années seulement après la mort de Maria Sophia, l'histoire fut mise par écrit et, fin 1812, la première publication du conte par les frères Grimm.


Blanche-Neige et Berthe au Grand Pied


Sans que cela puisse être une référence directe, Adenet le Roi dans son œuvre Li roumans de Berte aus grans piés où Bertrade de Laon (dite « Berthe au Grand Pied » à cause de son pied bot), femme de Pépin le Bref et mère de Charlemagne, est décrite comme « tant est blanche et vermeille qu'on peut s'y mirer »[22]. Elle se voit usurper son trône (et son lit) par la fille de la dame de compagnie de sa mère qui envoie des serviteurs la tuer en forêt. Mais ceux-ci n'en trouvant pas le courage la laissent s'échapper et ramènent en preuve de leur prétendu accomplissement du meurtre un cœur de sanglier[23]. Écrit au XIIIe siècle, ce roman pourrait avoir été influencé par d'autres récits, ou en influencer d'autres, le caractère légendaire de l'œuvre étant historiquement attesté ne serait-ce que par l'incohérence de la filiation de Berthe qui est ici attribuée au roi et à la reine de Hongrie nommés ici Floire et Blancheflor, couple célèbre et titre d'une œuvre du XIIe siècle attribuée à Robert d'Orléans, elle-même reprise dans plusieurs œuvres et qui s'inspire probablement du recueil Les Mille et Une Nuits.

La proximité des deux œuvres a été sommairement documentée par Albert Henry dans son analyse[24] du roman d'Adenet le Roi.


Analogies



Contes germaniques parents


Les frères Grimm ont indiqué qu'ils s'étaient inspirés, pour Blanche-Neige, du conte Richilde de Musäus (1782)[25]. Ils ont aussi noté la proximité de ce conte avec la légende scandinave de Snäsridr, épouse du roi Harald Ier de Norvège[26].


Autres contes de Grimm



Noir, blanc, rouge


L'image qui ouvre le conte (les couleurs du bois d'ébène et des gouttes de sang sur la neige, évoquant une enfant ou une femme), poétique et frappante, se trouve déjà dans L'Histoire de Peredur fils d'Evrawc, un conte gallois (XIIIe siècle), partiellement inspiré du roman arthurien de Perceval ou le Conte du Graal de Chrétien de Troyes. Le héros, Peredur, y observe un corbeau qui se pose sur le corps d'un canard tué par un faucon et gisant dans la neige :

« Peredur s'arrêta pour considérer la noirceur du corbeau, la blancheur de la neige et la rougeur du sang : il pensa à la chevelure de la femme qu'il aimait le plus au monde, qui était aussi noire que le jais ; il comparait sa peau à la blancheur de la neige, et la rougeur du sang sur la neige blanche aux deux pommettes rouges sur les joues de la femme qu'il aimait. »

 Anonyme gallois, L'Histoire de Peredur fils d'Evrawc[27]

Dans la version de Chrétien de Troyes[28], il s'agit d'une oie blessée par un faucon : Perceval s'absorbe dans la contemplation des gouttes de sang sur la neige, couleurs qui lui rappellent son amie Blanchefleur (la couleur noire est toutefois absente ici). Dans les trois cas, le personnage entre à cette vue dans une profonde rêverie. Pierre-Yves Lambert indique en note à propos du passage extrait de Peredur que « ce thème narratif est présent dans la légende irlandaise de L'exil des fils d'Uisnech »[29] ; dans ce texte en effet, le père nourricier de Deirdre écorche un veau sur la neige, un corbeau vient boire le sang : Deirdre déclare que l'homme qu'elle aimera aura ces trois couleurs.

Concernant Blanche-Neige, Natacha Rimasson-Fertin indique que dans d'autres versions du conte, soit « la reine, pendant qu'elle se trouve avec le roi dans un traîneau de chasse, épluche une pomme et se coupe le doigt » (Le Conte du genévrier, KHM 47, commence de façon similaire), soit – version bien plus brutale – « le roi et la reine passent près de trois tas de neige, puis près de trois fosses remplies de sang et voient enfin passer trois corbeaux » ; c'est le roi qui dans ce cas souhaite avoir une fille aussi blanche de peau, avec les joues aussi rouges et les cheveux aussi noirs, alors que la reine n'y tient pas. Un motif similaire ouvre, dans le Conte des contes de Basile[30], le conte IV, 9 (Le Corbeau ; un roi voit un corbeau mort dont le sang éclabousse une dalle de marbre, et souhaite une femme aussi blanche, rouge et noire), et le conte V, 9 (Les Trois Cédrats, plus parodique : Cenzullo se coupe le doigt et saigne au-dessus d'un caillé blanc, et se prend à désirer une femme au teint pareil à ce mélange de couleurs ; le conte précise que l'incident se produit alors qu'il « bâillait aux corneilles qui voletaient »).

Un conte assimilé, intitulé Incarnat Blanc & Noir et attribué à Louis de Mailly, figure dans Le Cabinet des fées[31].

Emmanuel Cosquin a consacré une monographie (Le Sang sur la neige) à ce motif dans son ouvrage Les Contes indiens et l’Occident[32]. Conformément à sa ligne générale, il est fervent partisan d'une origine indienne du motif, rappelant toutefois qu'Alfred Nutt le considère comme celtique, et Jacob Grimm (qui l'étudie dans sa préface à l'édition allemande du Pentamerone) comme résultant d'une sorte de génération spontanée commune à « tous les peuples ». Cosquin reproduit notamment un « conte maure » (recueilli à l'origine à Blida, en Algérie) intitulé La Princesse Sang-de-gazelle-sur-la-neige, qui contient un motif proche. Dans le conte berbère de Kabylie Loundja, fille de Tseriel[33], deux jeunes hommes tuent une perdrix dans la montagne, et évoquent Loundja, la seule jeune fille des environs « au teint blanc comme neige et vermeil comme sang ».

Le motif a été codifié Z65.1 par Stith Thompson, qui signale son association courante avec les contes-types AT 516 (Le Fidèle Jean), AT 709 (Blanche-Neige) et AT 720 (Ma mère m'a tué, mon père m'a mangé). Le motif du mythe-source irlandais est codifié Z65.1.1 (la rubrique générale Z65 est intitulée Color Formulas ; il est à noter que Thompson n'a pas recensé d'autre combinaison de couleurs que celle-ci)[34].


Versions dans d'autres cultures


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Delarue et Tenèze donnent comme exemple du conte-type AT 709 un conte corse recueilli par Geneviève Massignon, Angiulina (Anghjulina).

Joseph Jacobs a publié une version écossaise dans ses Celtic Fairy Tales, intitulée Gold-Tree and Silver-Tree[35].

En Russie, Alexandre Pouchkine a écrit un conte en vers sur ce thème, La Princesse morte et les sept chevaliers (en russe : Сказка о мёртвой царевне и о семи богатырях, 1833), qui a en 1951 servi de base à un dessin animé du même nom. Alexandre Afanassiev a également recensé deux versions d'un conte apparenté, Le Miroir magique (en russe : Волшебное зеркальце, no 210-211, la première version en biélorusse).

En Islande, Jón Árnason a publié un conte apparenté intitulé en français Vilfríđur plus-belle-que-Vala (en islandais : Sagan af Vilfríđi völufegri).


Adaptations



Cinéma et dessin animé


Snow White (1916).

Théâtre



Scène musicale



Bande dessinée



Littérature



Autres



Illustrations


Au XIXe siècle, grâce à la xylographie, et plus tard à la chromolithographie, les illustrations bon marché des contes se multiplient dans l'imagerie d'Épinal[40], les images à collectionner et les livres pour enfants. L'image est influencée par les modes et les stéréotypes de l'époque. À la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, Marianne Stokes ou l'illustrateur Franz Jüttner en donnent des versions inspirées par la vogue pour le Moyen Âge. Le film de Walt Disney fixera de façon durable l'iconographie du conte.


Illustrateurs



Notes et références


  1. Heinz Rölleke (Hrsg.), Dĭĕ ăltĕstĕ Mărchĕnsămmlŭnğ dĕr Brŭdĕr Ğrĭmm. Synopsie de la version originale écrite de 1810 et première édition de 1812., Fondation Martin Bodmer, Cologny-Genève 1975, pages 244-265.
  2. Ce que les contes nous racontent.
  3. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, éditions Hachette littérature, 1998, p. 297.
  4. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, éditions Hachette littérature, 1998, p. 301.
  5. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, éditions Hachette littérature, 1998, p. 314.
  6. Bruno Bettelheim, Psychanalyse des contes de fées, Pocket (ISBN 2-266-09578-1).
  7. (de) Eckhard Sander, Schneewittchen: Märchen oder Wahrheit? : ein lokaler Bezug zum Kellerwald, Gudensberg, Wartberg Verlag, , 96 p. (ISBN 9783861341635)
  8. Baptiste Levy, « La vraie histoire de Blanche-Neige n'est pas comme on la connait tous : voici la version originale du conte de fées » , sur Curioctopus, (consulté le )
  9. (de) Wulf Köhn, Vorsicht Märchen! - Wie Schneewittchen nach Alfeld kam. 2002 (ISBN 978-3-935928-03-8).
  10. ZDF-Dokumentation in der Reihe Märchen und Sagen – Botschaften aus der Wirklichkeit
  11. Schneewittchen starb in Langenbach
  12. Märchenlexikon
  13. Karlheinz Bartels, Schneewittchen, Zur Fabulologie des Spessarts, 2. Édition (réédition complétée), Lohr a. Main 2012, (ISBN 978-3-934128-40-8).
  14. Voir Lohrer Taufmatrikel du 19 juin 1725, archives paroissiales St. Michael Lohr a. Main, Matrikelbuch IV, p. 166.
  15. Werner Loibl, Die Schlacht bei Dettingen nach mainzischen Zeitzeugen, Sonderdruck aus: Die Schlacht bei Dettingen 1743, Beiträge zum 250. Jahrestag, Geschichts- und Kunstverein Aschaffenburg e.V., Aschaffenburg 1993, p. 92, Fußnote 19.
  16. Theodor Ruf, Die Schöne aus dem Glassarg La Belle du cercueil de verre »), Würzburg 1995 (ISBN 3-88479-967-3), p. 66.
  17. (de) Werner Loibl, Die kurmainzische Spiegelmanufaktur Lohr am Main in der Zeit Kurfürst Lothar Franz von Schönborns (1698-1729), page 277, in : Glück und Glas, Zur Kulturgeschichte des Spessarts, München, 1984, (ISBN 3-921811-34-1); sur l'histoire de la vitrerie de Kurmainz à Lohr, voir Werner Loibl, Die kurmainzische Spiegelmanufaktur Lohr am Main (1698 - 1806) und die Nachfolgebetriebe im Spessart, 3 Bände. Geschichts- und Kunstverein Aschaffenburge.V., Aschaffenburg 2012, (ISBN 978-3-87965-116-0), (ISBN 978-3-87965-117-7), (ISBN 978-3-87965-118-4) .
  18. Voir Das kurmainzische Försterweistum von 1338/39, abgedruckt bei K. Vanselow : Die Waldbautechnik im Spessart, Berlin 1926, pages 171-180
  19. Brigitte Schwamm, Atropa Belladonna, Eine antike Heilpflanze im modernen Arzneischatz, thèse de doctorat, Marburg 1987, publiée à Stuttgart, 1988 (ISBN 978-3769211436), page 273, voir particulièrement aussi note 165
  20. (de) M. B. Kittel : « Geschichte der freiherrlichen Familie von und zu Erthal », dans : archives Historischer Verein von Unterfranken und Aschaffenburg, Bd.17 (1865), H2/3, pages 217-219 ; sur l'importance du mot « Volksseele » voir Theodor Ruf, Die Schöne im Glassarg, Würzburg, 1995, (ISBN 3-88479-967-3), voir particulièrement page 13, 63ss, 90s.
  21. Adenet le Roi (1240?-1300?) Auteur du texte, Li roumans de Berte aus grans piés / par Adenés li Rois ; poème publié... par M. Aug. Scheler,..., (lire en ligne), vers 126
  22. Adenet le Roi (1240?-1300?) Auteur du texte, Li roumans de Berte aus grans piés / par Adenés li Rois ; poème publié... par M. Aug. Scheler,..., (lire en ligne), vers 657
  23. (ISBN 978-2-600-02575-1)
  24. (de) Texte en ligne sur Spiegel Online (Projekt Gutenberg.de).
  25. Note de Natacha Rimasson-Fertin pour Les Frères Grimm, Contes pour les enfants et la maison, José Corti, 2009 (ISBN 978-2-7143-1000-2) (tome 2).
  26. Les Quatre Branches du Mabinogi et autres contes gallois du Moyen Âge, trad., présentation et annotations Pierre-Yves Lambert, Gallimard / L'aube des peuples, 1993 (ISBN 978-2-07-073201-2)
  27. Chrétien de Troyes, Perceval le Gallois ou le Conte du Graal, in La Légende arthurienne - Le Graal et la Table ronde, Robert Laffont / Bouquins, 1989 (ISBN 978-2-2210-5259-4)
  28. Plus connu sous le nom de L'Exil des fils d'Uisliu. Voir (en) Early Irish Myths and Sagas, translation, introduction and notes by Jeffrey Gantz, Penguin Classics, 1981, (ISBN 978-0-140-44397-4) : The Exile of the Sons of Uisliu. Dans sa lamentation finale après la mort de Noísiu, Derdriu (Deirdre) utilise une variante de ce motif, évoquant « ses lèvres rouges, ses sourcils d'un noir de scarabée, et les perles brillantes de ses dents, de la noble couleur de la neige ». Ce type de comparaisons apparaît dans d'autres récits, comme La Destruction de la résidence de Dá Derga.
  29. Giambattista Basile (trad. Françoise Decroisette), Le Conte des contes, Strasbourg, Circé, 2002 (ISBN 2-908024-88-8)
  30. Incarnat Blanc & Noir sur Gallica.
  31. Les Contes indiens et l’Occident, Éditions Édouard Champion, 1922, p. 218-246 ; sur archive.org
  32. Taos Amrouche, Le Grain magique, Maspero, 1966 ; La Découverte, 1996 (ISBN 978-2-7071-5221-3).
  33. (en) Index des motifs de S. Thompson, groupe n° 258 (Center of Folktales and Folklore).
  34. (en) Gold-Tree and Silver-Tree, sur SurLaLune Fairy Tales.
  35. Voir la fiche sur Bédéthèque.
  36. Neil Gaiman, Miroirs et fumée, introduction p. 43, Éditions J'ai lu, Paris, 2000.
  37. https://www.fashionwindows.net/2010/09/concept-korea-spring-2011/ Article sur le défilé de model Concept Korea Spring 2011
  38. https://www.youtube.com/watch?v=gFqJCol9LTc Vidéo sur YouTube
  39. Contes de fées, les variantes narratives, Bibliothèque nationale de France.

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